LE PRESSOIR A GRAND POINT
L'invention du pressoir à levier se perd dans la nuit des temps. Devant le développement constant de la viticulture, il a fallu progressivement améliorer le rendement des pressoirs et, par voie de conséquence, la force appliquée. Les pressoirs à levier ont atteint des dimensions impres-sionnantes, de 12 à 13 mètres pour certains. Divers mécanismes ont été utilisés pour fournir la force de pression :
- à vis simple,
- à treuil,
- à taissons,
- à grand point.
Le pressoir à levier "à grand point" semble avoir été créé à la fin du XIVème siècle. Il en existait un daté de 1400 dans le Val de Vénoge. Mais le développement de ce type de pressoir ne semble pas avoir été rapide. C'est au XVIIIème siècle que l'usage du GRAND POINT va se répandre, surtout en Maconnais. Il permettait, avec un encombrement réduit, une très grande force de pressurage. Sa construction, de ce fait, était moins dispendieuse.
L'exemplaire présenté ici, et offert à la commune par Monsieur Jean BOULAGNON, a une longueur de 6,50 mètres et une hauteur de 3,70 mètres. Il possède une vis probablement en pommier d'un diamètre de 23 centimètres et une maie de 2,90 x 2,40 mètres. Comme on peut le constater, il est en parfait état et, de plus, conserve intact tous ses accessoires.
Il est certes un peu plus court que le grand point d'Hérémence (Valais) dont la longueur est de 7,80 mètres pour l'arbre de dessous et de 7,30 mètres pour le levier avec une vis de 23 centimètres de diamètre. Plus court aussi que celui du musée de Condom en Armagnac, dont l'arbre est millésimé 1880 (probablement reconstruit à cette date) et mesure 9,20 mètres de long. Mais ce dernier est très incomplet et présente des formes inhabituelles.
HISTORIQUE DU PRESSOIR
DE VIEILLE-BRIOUDE
La première trace de ce pressoir apparaît dans une donation en date du 11 juin 1856, ce qui atteste de son existence avant cette date. Le levier porte le millésime "1873" gravé en creux à la gouge, ce qui laisse supposer qu'il a été refait dans le courant de cette année. En effet, les fortes pressions exercées provoquaient souvent la cassure du levier.
Il voisinait, comme décrit dans la donation, avec cinq cuves de chêne, aujourd'hui disparues, qui reposaient sur cinq "chantiers".
L'importance de ce matériel atteste de la vitalité du vignoble brivadois au milieu du siècle dernier. La pénurie de vin, qui a suivi la destruction du vignoble méridional par le phylloxéra, a été compensée par l'extension du vignoble de Limagne et du haut bassin de l'Allier. La position favorable de ces vignobles, plus proche de Paris et du Nord, explique la prospérité, pendant plus de vingt ans, des zones cultivées en vigne. La maison Boulagnon avec son gigantesque pressoir, ses deux grandes caves au riche escalier en pierre de Volvic, son garde-corps, simple et beau, en fer forgé et des installations d'avant-garde pour l'exploitation viticole, est le témoin de la richesse que la viticulture apporta dans le Brivadois, dans le dernier quart du XIXème siècle.
En remettant ce pressoir à la commune de Vieille-Brioude, Monsieur Jean BOULAGNON a souhaité que, pour la première fois en Auvergne, un pressoir soit exposé à la vue du public, comme cela se voit au Luxembourg, en Allemagne et en Suisse. Ce don vient accroître le patrimoine local et pourrait être l'amorce d'une démarche plus ambitieuse permettant de faire connaître à tous l'importance de la vigne dans la vallée de l'Allier.
d'après J. Pestre